En 1946, l’association américaine de gérontologie nouvellement créée a expliqué dans le premier article du premier numéro de son Journal of Gerontology, la nécessité de se préoccuper « de ne pas ajouter plus d’années à notre vie, mais plus de vie à nos années« .
En 1936, Louis Dublin, le statisticien du Metropolitan Life a fait équipe avec le démographe et mathématicien Alfred Lotka pour calculer l’espérance de vie maximale théoriquement possible. Ils étaient arrivés à une limite de 69,93 ans. Cette limite a été dépassée par les femmes en Islande 5 ans plus tard, par les femmes américaines en 1949, et par les hommes américains en 1979.
L’espérance de vie a augmenté à un rythme régulier de 3 mois par an durant les 175 dernières années. Les calculs de durée de vie humaine maximale théorique sont, à chaque fois, devenus obsolètes cinq ans après avoir été publiés. Dans certains cas, ils avaient même déjà été dépassés quelque part dans le monde au moment même où ils étaient révélés. Ce que nous entendons par « durée de vie naturelle » est tout simplement un équilibre entre deux forces qui s’opposent : l’usure de la vie quotidienne contre la capacité limitée des mécanismes de réparation de notre organisme. Modifier cet équilibre revient soit à augmenter le taux ou l’efficacité de la réparation, soit à réduire le taux d’usure.
Eileen Crimmins de l’Université de Californie du Sud et ses collègues ont mené une étude pour observer l’espérance de vie moyenne en bonne santé, c’est à dire le nombre d’années sans grandes limitations dues à une maladie. Ils ont ainsi découvert que la plus forte augmentation de l’espérance de vie en bonne santé, après 65 ans, était survenue pendant la dernière décennie. Les américains, en 2010, pouvaient espérer vivre 80% de leur vie sans incapacité majeure, y compris plus de la moitié de leurs années après 65 ans. Une nouvelle étude a également mis en évidence, qu’au cours des deux dernières décennies, l’incidence des nouveaux cas de sénilité avait chuté de 20%. Résultat, les hommes au Royaume-Uni deviennent aujourd’hui séniles au même rythme que ceux cinq ans plus jeunes dans les années 90 (pour les femmes l’amélioration est plus modeste).
Imaginez, maintenant, que la tendance du siècle dernier se poursuive encore au cours des cent prochaines années. Nos arrières petits-enfants de 50 ans pourraient donc encore avoir en moyenne 50 ans à vivre en bonne santé.
La partie la plus riche du monde a déjà bénéficié de l’ensemble des avantages dus à l’amélioration de la nutrition et de l’hygiène de base. Ce sont maintenant les avancées technologiques dans le domaine de la santé qui vont nous permettre d’ajouter plus de vie à nos années. Le diabète, par exemple, est passé, au 20e siècle, du statut de tueur à une maladie chronique gérable. Au 21e siècle, le SIDA a connu la même transformation. Le plus grand tueur actuel de tous les pays développés, les maladies cardiovasculaires, pourraient finir par suivre le même chemin dans le futur.