L. Bardon . – Selon la FTC, Facebook a le monopole des réseaux sociaux. Or, en 2016, des informations ont révélé que Cambridge Analytica avait recueilli des données sur les utilisateurs de Facebook sans leur consentement à l’approche de l’élection présidentielle américaine. Depuis 2017, Facebook fait donc l’objet d’une surveillance réglementaire accrue aux États-Unis. Le géant technologique a tenté d’enrayer ce déficit de confiance en effectuant des modifications sur la plateforme pour améliorer la gestion de la vie privée. Les groupes ont alors pris une place prépondérante, et été promus comme des espaces de confiance autour de communautés d’intérêts communs. Ils sont aujourd’hui exploités par des acteurs malintentionés à des fins de désinformation politique.
En décembre dernier, Facebook était confrontée à des actions en justice déposées en parallèle : l’une par la Federal Trade Commission, l’autre par une coalition de 46 États, plus Guam et le district de Columbia. Le juge James E. Boasberg a récemment rejeté l’intégralité de la plainte des États, principalement parce qu’il a estimé qu’ils avaient attendu trop longtemps avant de la déposer. Mais, pour des raisons juridiques « bizarres », le problème du délai ne s’applique pas au gouvernement fédéral. Et donc le cœur de l’effort juridique de la FTC – qui cherche à forcer Facebook à vendre Instagram et WhatsApp – est toujours d’actualité.
Il est important de garder à l’esprit que l’affaire n’en est qu’au premier stade de la procédure. À ce stade du litige, le plaignant – dans ce cas, la FTC – a un gros avantage. Il n’a pas à prouver quoi que ce soit. Il lui suffit d’alléguer des choses qui constitueraient une violation de la loi si elles s’avéraient vraies. Dans le cas d’un monopole, en vertu de la section 2 du Sherman Act, cela signifie qu’il faut alléguer de manière plausible qu’une entreprise détient un monopole sur un marché clairement défini.
La première étape consiste à définir ce qu’est ce marché. Les affaires d’antitrust sont souvent gagnées ou perdues à cette étape, car l’entreprise poursuivie proposera toujours une définition qui inclut beaucoup de concurrents.
C’est à l’étape suivante que la FTC a eu des problèmes. Après avoir défini le marché, elle a dû démontrer que Facebook contrôlait ce marché. Or, dans la législation antitrust, le fait de détenir du pouvoir sur un marché, également appelé pouvoir de monopole, ne signifie pas simplement qu’une entreprise est grande ou influente. Le pouvoir sur un marché a une signification spécifique et technique : la capacité d’augmenter les prix (ou de réduire la qualité) sur une période prolongée sans perdre de clients au profit de la concurrence.
La FTC pourrait également utiliser ce que l’on appelle des preuves directes : des exemples spécifiques de Facebook exerçant son pouvoir sur le marché. En général, cela implique de montrer qu’une entreprise a augmenté ses prix au-delà des niveaux concurrentiels. Facebook étant gratuit, cette option n’est pas envisageable. Mais une autre façon de prouver le pouvoir de marché est de montrer qu’une entreprise a réduit la qualité de son produit tout en maintenant le prix constant. L’une des principales allégations de la coalition d’États, aujourd’hui rejetée, était que, au fur et à mesure que Facebook devenait plus puissant, le géant technologique dégradait ou reniait ses engagements en matière de protection de la vie privée des utilisateurs, sachant que les personnes qui étaient en désaccord n’auraient pas un autre réseau social équivalent sur lequel basculer.