Technologie sans conscience n’est que ruine de l’Homme.
Pourquoi cet article est intéressant ? L. Bardon . – Il y a cinq ans, la Chine dévoilait son 13e plan quinquennal (2016-2020) portant sur l’économie national et le développement social lors de la 4e session du 12e congrès du peuple national. 23 milliards de dollars de formation pour préparer la bascule des bassins d’emplois historiques vers les nouveaux secteurs porteurs dans les 5 ans tels que les technologies de l’information et de la communication, les nouvelles énergies, les nouveaux matériaux, l’ aéronautique, la médecine biologique et le smart manufacturing. En parallèle la Chine décidait d’implémenter la politique des 2 enfants, d’accélérer son urbanisation, de faire émerger des “super-régions”, et de déployer la 5G et d’autres infrastructures Internet haut débit. Puis l’an dernier, en plein « covid-19 », la Chine publiait un nouveau plan ambitieux pour stimuler le développement des “industries émergentes stratégiques”, de la construction de réseaux mobiles 5G à la robotique industrielle, dans le but de contrer l’embargo technologique croissant de Washington tout en servant l’économie nationale. L’Empire du Milieu s’est donné pour objectifs de : construire “10 bases industrielles émergentes stratégiques ayant une influence mondiale, 100 grappes industrielles émergentes stratégiques ayant une compétitivité internationale, et 1 000 écosystèmes industriels émergents stratégiques ayant des avantages uniques”. Pour y parvenir, le gouvernement a identifié huit domaines où investir : les applications des réseaux 5G ; la biotechnologie et le développement de vaccins ; la fabrication haut de gamme telle que la robotique industrielle ; les nouveaux matériaux pour les grands avions et la fabrication de puces ; les nouvelles technologies énergétiques ; les technologies et équipements verts ; les véhicules intelligents et à énergie nouvelle ; et les entreprises numériques créatives. Ce nouvel élan d’indépendance technologique va-t-il pleinement et pour longtemps placer la Chine comme n°1 de l’innovation ?
Synthèse
De la big tech à l’edtech en passant par la fintech, tout ce qui contient le mot « tech » semble avoir des problèmes en Chine. Les mesures réglementaires rapides prises au cours des 6 à 8 derniers mois, dans un secteur technologique chinois en plein essor, ont pris les observateurs et les investisseurs au dépourvu. De nombreuses explications ont été avancées – de l’entrée de la politique dans la « saison de campagne » de 2022 à l’affaiblissement du secteur privé – mais beaucoup de choses demeurent floues. Plutôt que de spéculer davantage sur ce qui s’est passé cette année dans le secteur technologique, nous avons analysé des données pour tenter d’identifier une méthode qui expliquerait cet ensemble de décisions.
Un examen des 500 entreprises privées les plus valorisées de la liste Hurun en Chine – dont environ la moitié appartiennent au secteur des technologies (échantillon de 238) – a permis de déterminer quelles entreprises avaient été ciblées. Nos principales conclusions sont les suivantes :
1) les régulateurs ont presque exclusivement ciblé les entreprises de « bits » (logiciels) plutôt que les entreprises d' »atomes » (matériel) ;
2) les mesures réglementaires prises semblent être corrélées à la taille de l’entreprise ;
3) ces mesures étaient probablement de nature moins politique que la conséuquence d’une fenêtre d’opportunité.
L’explication la plus appropriée vis-à-vis du timing semble être économique. Le gouvernement chinois se prépare depuis un certain temps déjà à intervenir dans le secteur des technologies. Mais sachant que ces chocs réglementaires auraient des répercussions économiques, notamment sur le marché boursier, Pékin avait besoin d’une opportunité. Cette dernière s’est présentée au début de l’année, lorsque l’économie chinoise s’est remise de la pandémie. S’il n’y a pas de moment optimal pour l’exécution de mesures réglementaires qui provoqueront des fluctuations du marché, l’année 2021 s semblé être la moins impactante. Si la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine et la pandémie n’avaient pas créé une incertitude économique considérable pendant près de deux ans, ces mesures auraient probablement été prises dès 2019 ou 2020. Maintenant que Pékin doit faire face, de manière inattendue, à des retombées dans le secteur immobilier et à une pénurie d’énergie, il est probable que le secteur technologique connaisse une accalmie.
L’image qui en résulte est fondamentalement conforme à la vision de la technologie décrite dans le 14e plan quinquennal de la Chine. La quasi-totalité des « industries piliers » mises en avant dans ce plan ne sont pas issues du monde du logiciel comme le commerce électronique ou la cryptographie, mais des atomes comme les nouvelles énergies, les équipements haut de gamme, les véhicules électriques (VE) et les biotechnologies.
La suite ici (Ruihan Huang et Joshua Henderson)