Les nazis considéraient que communiquer de façon secrète était la clé de la domination du monde. Ils avaient donc mis au point une technologie, la machine électromécanique Enigma, un dispositif de cryptage qui permettait aux divisions de char allemandes, aux ambassades et même aux sous-marins d’envoyer des messages radio brouillés pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils croyaient que leur système était incassable. Jusqu’à ce qu’un jeune mathématicien britannique du nom d’Alan Turing réalise que le signal pouvait être décrypté s’il pouvait créer une machine qui lui permettrait d’essayer systématiquement des milliers de combinaisons de touches. Il a ainsi mis au point le premier ordinateur du monde. La capacité de la Grande-Bretagne à lire les codes secrets de l’Allemagne fut un élément crucial de la victoire des Alliés.
Quelques décennies plus tard, une technologie appelée cryptage quantique rend le fantasme d’une communication parfaitement sécurisée réaliste. Pourquoi c’est important ? Parce que l’adoption de cette technologie pourrait marquer la fin de la fraude en ligne, du vol d’identité, des tentatives de piratage et d’écoute électronique. A contrario, le cryptage quantique pourrait aussi permettre aux terroristes et aux criminels de communiquer dans le plus grand secret, et aux gouvernements de cacher leurs secrets sans que personne ne s’en aperçoive. Dans un monde où le cryptage serait incassable, toute communication électronique humaine pourrait devenir entièrement privée, avec des conséquences bonnes ou mauvaises en termes de cybersécurité.
Le 29 septembre dernier, cette possibilité s’est sensiblement rapprochée de la réalité. Une équipe de cryptographes et de physiciens de l’Académie chinoise des sciences a organisé une vidéoconférence d’une demi-heure avec leurs homologues à Vienne, en utilisant le cryptage quantique, ce qui a effectivement rendu impossible le piratage ou l’écoute de la communication.