Comment un géant chinois de l’IA a rendu facile communication et surveillance

Image par PIRO4D de Pixabay

La Chine sait créer, implémenter et piloter des stratégies à très long terme. L’Empire du Milieu a les moyens de ses ambitions et l’ambition de retrouver sa place sur l’échiquier mondial. Tik tok, plateforme chinoise encore méconnue du grand public, a acquis une grande influence dans l’industrie musicale par exemple. Intéressant de constater en parallèle que c’est la Chine, et non un voisin européen, qui a aidé l’Italie contre covid-19. “Petit à petit l’oiseau fait son nid.”  Ou devrais-je écrire le dragon…

En 2017, le MIT Technology Review a nommé iFlytek dans sa liste des 50 entreprises les plus intelligentes du monde, et le gouvernement chinois lui a donné une place convoitée dans son “équipe d’IA” nationale triée sur le volet. Les autres entreprises sélectionnées cette année-là étaient les géants Baidu, Alibaba et Tencent.

Deux décennies après que Julian Chen eut pressenti que l’informatique vocale allait révolutionner la façon dont les gens interagissent avec les ordinateurs en Chine, son impact y est en effet spectaculaire. Chaque jour, les utilisateurs de WeChat envoient environ 6 milliards de messages vocaux, des messages vocaux occasionnels qui sont plus intimes et immédiats que la messagerie vocale typique. Parce que WeChat plafonne les messages à une minute, les gens les envoient souvent en une longue chaîne. iFlytek fabrique une tablette qui transcrit automatiquement les réunions d’affaires, un enregistreur numérique qui génère des transcriptions instantanées, et un assistant vocal qui est installé dans les voitures à travers le pays.

Si les produits de consommation sont importants pour iFlytek, environ 60 % de ses bénéfices proviennent de ce qui est décrit dans le rapport semestriel 2019 de la société comme des “projets impliquant des subventions gouvernementales”. Ces projets comprennent un “système intelligent d’aide aux enquêtes criminelles”, ainsi qu’un important support à l’exploitation des données pour le gouvernement de la ville de Shanghai. Ces projets permettent d’accéder à des données. La mission de traduction d’iFlytek va bien au-delà de l’aide aux voyageurs, aux hommes d’affaires et aux élites urbaines. Elle a développé des produits pour les minorités ethniques et les populations des zones rurales où de nombreuses personnes ne parlent pas le mandarin, et elle améliore constamment son traitement des dialectes.

Le travail d’iFlytek a fait l’objet d’une suspicion particulière dans les régions qui constituent une menace pour le pouvoir du Parti. Selon Human Rights Watch, la technologie d’iFlytek semble par exemple permettre une surveillance dans le Xinjiang, une région du nord-ouest de la Chine peuplée par la minorité ouïgoure, majoritairement musulmane.

Ces dernières années, iFlytek est entré dans une phase d’expansion internationale, en négociant des partenariats de recherche avec des universités au Canada, en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis. En octobre dernier, le ministère du commerce a inscrit iFlytek sur la liste des entreprises soumises à des restrictions à l’exportation du gouvernement américain.

L’État de surveillance chinois a parfois fait appel à ce que le chercheur Jathan Sadowski appelle “l’IA Potemkin” – une technologie qui semble toute puissante mais qui ne l’est pas. Mais sur le plan pratique, que la technologie soit aussi précise que ce qui est annoncé ne fait guère de différence. Lorsque les gens ont l’impression que l’État peut les localiser en utilisant seulement quelques secondes d’audio intercepté, ils commencent à s’autocensurer. Big Brother est intériorisé.

La suite ici (Mara Hvistendahl)

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Fondateur paris-singularity.fr👁️‍🗨️Entrepreneur social trackant les deep techs

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