L. Bardon . – Après 40 ans de croissance économique, avec une moyenne de près de 10% par an, la Chine s’est mué en dragon et abrite 6 des mégalopoles du monde. Son économie n’est aujourd’hui plus dépassée que par celle des États-Unis. L’Inde montre les crocs alors que ses 1,3 milliards d’habitants constitue le marché qui connaît la croissance la plus rapide au monde en nombre d’utilisateurs d’Internet. Les changements politiques en cours en Inde pourraient d’ailleurs freiner les vues des GAFA sur ce qui était considéré comme le prochain Eldorado pour la croissance de ces géants.
Depuis son arrivée au pouvoir en 2014, Modi a bénéficié d’une audience massive sur Facebook, Twitter et Instagram, et a invité des mastodontes technologiques étrangers à investir en Inde. Mais ces entreprises font constamment l’objet d’un examen minutieux – surtout lorsqu’elles deviennent des foyers de dissidence autour de sujets tels que les protestations des agriculteurs ou la mauvaise gestion de Covid-19.
La législation indienne visant spécifiquement les entreprises de technologies de l’information a d’abord pris la forme de l’Information Technology Act, 2000, qui régissait toutes les questions relatives aux technologies numériques. Cette réglementation a fourni un cadre pour effectuer des transactions électroniques, numériques et en ligne légales et dignes de confiance, et a mis en place des garanties juridiques contre la cybercriminalité. Cependant, deux décennies plus tard, la façon dont les Indiens utilisent l’internet pour effectuer des transactions, investir et épargner de l’argent, et consommer du contenu, entre autres choses, a radicalement changé. Par conséquent, diverses modifications ont été apportées à cette politique générale.
Ces changements, selon beaucoup, sont utilisés comme une occasion de réprimer et de contrôler ce qui se passe sur Internet. Par exemple, un projet de loi de 2019 sur la protection des données prévoit que les données des Indiens doivent être stockées dans le pays, ce qui constitue un cauchemar logistique et infrastructurel pour de nombreux acteurs mondiaux. Mais plus inquiétant, c’est le signe d’un gouvernement autoritaire et de sa réforme de la surveillance. Outre les menaces sur la vie privée, la liberté d’expression est également attaquée par une série de règles.
Depuis l’entrée en vigueur des règles relatives aux intermédiaires en février dernier, les bureaux de Twitter ont été perquisitionnés et les autorités ont demandé à l’entreprise, ainsi qu’à Instagram et à Facebook, de supprimer des centaines de messages. Du côté de l’OTT, plusieurs réalisateurs de web-séries ont présenté des excuses et coupé des scènes pour éviter des poursuites judiciaires et des arrestations. En plus de la certification du contenu et de l’autocensure, il existe un organisme gouvernemental qui peut annuler les décisions concernant tout contenu OTT.
L’inquiétude vient du fait que le gouvernement choisit les mauvaises batailles. Les lois indiennes sur les technologies de l’information n’ont pas suivi le rythme des nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle, l’informatique dématérialisée, la mobilité, l’internet des objets et l’informatique quantique. Et la gamme de problèmes qui accompagnent la révolution Internet en Inde a été largement ignorée. L’Inde est déjà perçue comme ayant un environnement commercial défavorable, se classant 48e sur 57 pays en ce qui concerne la facilité d’entreprendre sur Internet. Les réglementations restrictives en matière de technologie ne font qu’accroître les craintes d’échec sur un marché hostile.
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