Technologie sans conscience n’est que ruine de l’Homme.
Pourquoi cet article est intéressant ? L. Bardon . – Jusqu’à la pandémie, les mondes virtuels étaient surtout perçus comme le lieu de rassemblement de joueurs bizarres et antisociaux. Il y aura un avant Covid et un après Covid. Des millions de sceptiques, en manque de liens sociaux, se sont mis à rejoindre des mondes virtuels comme Second Life, Animal Crossing, Fortnite ou Roblox, pour participer à des activités assister à des événements autrefois prévus dans le monde réel ou passer du temps avec leurs enfants au sein de ces mondes. De la même manière, avant la pandémie, des millions de consommateurs refuser d’acheter de la nourriture en ligne. La crise sanitaire a forcé bon nombre de récalcitrants à utiliser les services de livraison de produits alimentaires. Ces clients ont découvert qu’en réalité leurs courses se passaient bien et que le processus était assez simple. Si
C’est un peu comme l’épicerie en ligne. Des millions de consommateurs connaissent l’existence de ce service depuis des années, mais refusent de l’essayer parce qu’ils pensent que s’ils ne choisissent pas eux-mêmes leurs produits, ils arriveront gâtés, endommagés ou inacceptables. Mais le coronavirus a forcé bon nombre de ces récalcitrants à utiliser la livraison de produits alimentaires depuis des mois. En conséquence, ces clients ont découvert qu’en fait, leurs courses se passaient bien et que le processus était relativement simple. Certains reviendront à l’achat en personne, mais pas tous, ni tout le temps…
Bientôt, tous les endroits et toutes les choses du monde réel (toutes les rues, tous les lampadaires, tous les immeubles et toutes les pièces) auront leur jumeau numérique grandeur nature. Saviez-vous par exemple que l’Agence Spatiale Européenne construisait un “jumeau numérique” de la Terre dans l’espace numérique pour mieux prévoir les phénomènes météorologiques extrêmes induits par le changement climatique ?
Certains joueurs ingénieux ont créé une banque dans EVE Online en 2009, appelée E-Bank. Ils ont essentiellement créé un système de compte similaire à ce qui existait déjà dans les banques centrales du monde réel. Ils accordaient des prêts, payaient des intérêts, avaient un PDG, un conseil d’administration et étaient extrêmement bien organisés. Puis le PDG a volé 200 milliards d’ISK (la monnaie d’EVE) et les a échangés contre plus de 6 000 dollars australiens. Bienvenue dans la métaconomie : l’économie du Metaverse. Dans ce contexte, je crains que toute stratégie de construction d’espaces virtuels basée sur la publicité, l’économie de l’attention et détenue par une seule entreprise ne soit potentiellement extrêmement préjudiciable aux personnes.
Synthèse
Le monde de la technologie est en ébullition dès lors que l’on évoque le Metaverse, à savoir un monde virtuel où des millions de personnes pourraient bientôt se réunir pour travailler, jouer et se rencontrer. L’idée n’est pourtant pas aussi nouvelle qu’il n’y paraît. Depuis 2003, des gens se réunissent pour faire tout cela dans Second Life. Ses créateurs, Linden Lab, se donnent beaucoup de mal pour souligner que Second Life n’est pas un jeu, contrairement à d’autres expériences comme Fortnite ou Roblox. Dans Second Life, il n’y a pas de buts ou d’objectifs. Les utilisateurs créent un avatar numérique qui les représente et sont ensuite libres d’explorer le monde, de rencontrer d’autres utilisateurs, de créer leur propre contenu numérique et même d’échanger des biens et des services dans la monnaie du monde, le Linden Dollar.
Second Life reste la plus grande expérience et la plus proche d’un Metaverse que nous ayons. Les environnements utilisés par les enfants, comme Roblox, sont également très intéressants, mais très différents en termes d’offre. Second Life représente encore 650 millions de dollars US par an en transactions et un million de personnes l’utilisent. Mais Second Life ne s’est pas développé au-delà d’un million de personnes, et ce malgré Covid-19. Pourquoi ? Probablement parce que la plupart des adultes ne sont pas encore à l’aise pour s’engager avec de nouvelles personnes, ou pour s’engager socialement, dans un contexte multi-joueurs en ligne. La salle de réunion Horizons dont Facebook a récemment fait la démonstration illustre cela. Les écrans ne sont pas encore confortables. Lorsque vous utilisez des lunettes de réalité virtuelle VR, vous ne pouvez pas utiliser votre téléphone et vous ne pouvez pas taper.
De nombreuses expériences humaines trouvent leur intérêt dans la richesse des interactions conditionnée au fait que plus de 100 personnes soient à portée de voix et de visibilité les unes des autres. C’est un problème technique encore largement non résolu. Que l’on parle de Fortnite, de Second Life ou de Roblox, il n’est pas encore possible de réunir un tel nombre de personnes au même endroit. Les célèbres concerts Fortnite que nous avons vus réunissaient tous moins de 100 personnes. C’est une expérience très différente de celle à laquelle nous nous attendons lorsque nous assistons à un événement musical en direct.
Si vous voulez réellement construire un monde virtuel à l’échelle de plusieurs milliards, tout le monde devra d’une manière ou d’une autre travailler en parallèle. Pour obtenir tous ces espaces, l’idée que tout soit fait par une seule entreprise comme Facebook, Google ou Apple semble complètement irréalisable. Nous avons aussi besoin d’ujne monnaie numérique pour que les gens puissent faire du commerce. Pour obtenir que quelqu’un puisse fabriquer des voitures au sein d’un Metaverse et les vendre, il faudrait aussi probablement disposer d’un système monétaire qui englobe plusieurs monnaies locales.