deep tech innovation Metaverse — Image by Nurudeen Alidu from Pixabay

Il n’existe pas de consensus sur ce qu’est le Metaverse.

Le Metaverse est un nouveau type d’expérience dont le potentiel commence tout juste à être explorée. Il pourrait constituer quelque chose d’incroyablement positif, de destructeur ou bien un entre deux. Comme le fut en son temps l’énergie nucléaire. Après environ 40 ans de travaux et la découverte de la grande quantité d’énergie que pouvait produire la fission, la première application ne fut pas une centrale mais une bombe.

Nous sommes donc en train de construire la partie invisible, les fondations du Metaverse.

Or, chaque couche en cours de construction du Metaverse comporte un peu de :

BON,
de BRUTE,
et de TRUAND.

Et le TRUAND

deep tech innovation numérique Metaverse — Image by shykhman from Pixabay

La « metaconomie » (économie du Metaverse) pour être le cheval de Troie d’un système de surveillance plus poussé

Lorsque nous effectuons des paiements via nos comptes bancaires et nos cartes de crédit, nous concluons un marché : une transation simple et rapide contre le fait que nos transactions soient visibles pour les entreprises concernées. Chaque transaction laisse une trace.

En Chine, les autorités ont inventé un concept d’”anonymat contrôlable” pour le yuan numérique. Si les protagonistes des transactions sont anonymes les uns vis-à-vis des autres, la banque centrale peut “désanonymiser”. Si aider les personnes qui n’ont pas accès à des comptes en banque semble louable, que se passera-t-il si le résultat final est un système de comptes bancaires surveillés ? Il est possible d’obtenir une très bonne confidentialité pour les paiements numériques, affirme Ari Juels, cryptographe à l’université Cornell, qui a étudié les modèles de monnaie numérique pour les banques centrales. Mais on ne sait pas exactement quel degré de confidentialité les gouvernements autoriseront et dans quelle mesure la confidentialité compromet l’efficacité et la sécurité.

Et malheureusement ce monde est loin d’être altruiste.

Les investisseurs et les banquiers sont en profond désaccord sur la façon dont les crypto-monnaies finiront par s’imposer, mais leur extrême volatilité en fait un investissement de plus en plus important. Tandis que le bitcoin, l’ethereum et d’autres monnaies numériques sont de plus en plus acceptés par Wall Street, un nombre toujours croissant de nouvelles monnaies non testées émerge, dont certaines sont si douteuses qu’elles sont littéralement appelées « monnaies de merde« . Etant donné les pannes techniques et les variations soudaines de prix, il n’y a aucune garantie que ces jetons puissent être convertis en espèces. Et dans le monde de la crypto-monnaie, il est également considéré comme un rite de passage d’être arnaqué à un moment ou à un autre.

En 2009, par exemple, des joueurs ingénieux ont créé une banque dans EVE Online, la E-Bank. Ils ont ainsi créé un système de comptes similaire à ce qui existait déjà dans les banques centrales du monde réel. Ils accordaient des prêts, payaient des intérêts, avaient un PDG, un conseil d’administration et étaient extrêmement bien organisés. Puis le PDG a volé 200 milliards d’ISK (la monnaie d’EVE) et les a échangés contre plus de 6 000 dollars australiens.

Si les investisseurs fortunés peuvent supporter et accepter ce risque, cela pourrait rendre vulnérables les autres acteurs du marché, notamment dans les pays en développement.

Les monnaies soutenues par le gouvernement dominent encore le monde d’aujourd’hui. Si des monnaies numériques privées commencent à concurrencer les monnaies nationales, cela pourrait rendre certaines d’entre elles plus volatiles. Il y a presque 200 ans, il s’est passé un phénomène assez similaire aux Etats-Unis. En 1830, 90 % de la masse monétaire américaine était constituée de billets de banque privés. Lorsque Facebook a déclaré que nous pourrions acheter du Libra (projet devenu caduc) en utilisant les monnaies locales, le spectre de la volatilité des prix que les monnaies privées ont provoqué aux États-Unis dans les années 1830 a resurgi. A l’époque, l’impopularité du système a influé sur la décision du gouvernement, quelques décennies plus tard, de le remplacer par un système bancaire national. De ce chaos, est né le dollar et sa domination. La valeur d’une monnaie est stable dès lors que son émetteur est crédible. L’instabilité de la politique au Venezuela ces dernières années a contribué à la perte de valeur de sa monnaie par rapport au dollar. Par analogie, si une grande entreprise émettait aujourd’hui ses propres pièces virtuelles mais que son modèle d’affaires déclinait, ou si les gens commencent à douter de la viabilité future de l’entreprise, alors cela impacterait certainement le désir qu’auront les gens de détenir la dite crypto-monnaie.

Certains pays, dont la Chine et la Suède, testent donc des versions de cette idée de cryptomonnaie étatique. Les Bahamas ont déjà lancé une monnaie numérique de la banque centrale, ou CBDC, qu’ils appellent le Sand Dollar. Néanmoins, il reste de nombreux détails à régler.

Qui supervise la monnaie numérique ?

Comment est-elle reliée aux banques privées et aux services de paiement ?

Quelles personnes voudront l’utiliser ?

deep tech innovation blockchain cryptomonnaies souveraineté — Image par Tamim Tarin de Pixabay

Autre problème : les paiements numériques ont du mal à rester privés.

La « metaconomie » est encore inutile et inaccessible à un grand nombre de personnes

Le volume du marché des NFT dépasserait 700 millions de dollars et OpenSea se dirige vers une valorisation de 100 milliards de dollars en un temps record. Les places de marché basées sur la blockchain Etherum semblent s’imposer comme une infrastructure stratégique qui soutiendra les économies métaverses, mais pour l’instant, il manque quelque chose de crucial aux NFT: l’utilité et des économies connectées.

Les biens numériques sont achetés et vendus. C’est donc un marché de spéculation qui repose sur peu d’usages réels. Pour créer des économies fonctionnelles dans le Metaverse, les propriétaires devraient pouvoir faire quelque chose de concret de leurs biens. Par exemple, si j’achète un tableau récemment “minté”, je voudrais pouvoir meubler ma maison virtuelle avec. Pour l’instant, tout ce que je peux faire, c’est admirer mon achat sur OpenSea ou un autre site et donner l’URL à tout le monde.

Ce problème va demeurer pendant un certain nombre d’années, le temps que les industriels s’accordent (ou pas) sur des normes et l’interopérabilité. Tim Sweeney, CEO d’Epic Games, estime que nous devrons attendre encore au moins 5 à 10 ans. Ce retard pourrait tuer net l’émergence de la métaconomie.

En outre, la promesse d’échanges basés sur la blockchain et la prolifération de différents altcoins qui les alimentent devraient signifier que le transfert de la valeur des biens et services à travers différents Metaverse sera facile. Mais nous en sommes encore très loin.

Différents mondes virtuels sont créés, avec leurs propres économies basées sur des jetons propriétaires. Il n’y a pas de véritable échange connecté de valeurs ou d’actifs vers d’autres mondes. Ma parcelle de terrain sur Decentraland n’a aucune valeur si je veux l’échanger contre un Land dans The Sandbox par exemple. De même, les mécanismes d’achat, de vente et d’échange par le biais des plateformes existantes nécessitent un certain niveau de compréhension des crypto-monnaies et de l’utilisation de Metamask, par exemple. Les altcoins doivent être convertis en Ether ou dans une autre crypto-monnaie, puis à nouveau en altcoin d’un autre Metaverse pour pouvoir être échangés – ce qui entraîne à chaque fois des frais.

Nous n’en sommes qu’aux balbutiements d’un marché d’échange fonctionnel, aussi accessible que le fiat, mais qui exclut un grand nombre de personnes désireuses de participer au Metaverse mais ne comprenant pas le fonctionnement de la métaconomie.

Le Metaverse est un des futurs possibles d’Internet d’ici… au moins 10 ans

Si le Metaverse était un iceberg, la partie visible serait un nouveau type d’expérience. Alors que la partie invisible serait : des interactions sociales, de nouveaux modèles économiques, des devices, des réseaux de communication, de nouveaux comportements individuels, de nouvelles communautés, de nouveaux usages, des killer apps, des marques, du gaming, du matériel informatique physique et virtuel… Le concept de Metaverse est donc, notamment, une combinatoire de plusieurs technologies telles que la réalité augmentée, l’Internet des objets, la 5G, l’intelligence artificielle, les technologies spatiales, la blockchain… Toutes étant au service de l’immersion dans ce que certains qualifient être le futur d’Internet. Plusieurs de ces technologies ont été lentes à mûrir, mais elles approchent du niveau de performance minimum pour que ce soit un succès.

Par exemple, la plupart des casques de réalité virtuelle doivent encore être reliés à un PC ou à une console de jeu pour atteindre la puissance de traitement et la vitesse de communication nécessaires à des expériences fluides et immersives. Avec des processeurs toujours plus rapides et des communications sans fil à haut débit à l’horizon, une meilleure résolution visuelle et des expériences sans fil devraient voir le jour au cours des prochaines années.

Au lieu de regarder les informations, vous pourriez être au coeur même des informations. Au lieu d’apprendre l’histoire de l’Egypte ancienne ou de la Grèce antique dans des livres, vous pourriez vous y immerger virtuellement, parcourir l’univers et échanger directement avec les avatars des habitants de l’époque.. Au lieu de regarder un match de basket à la télévision de façon statique, vous pourriez tourner la tête à 360° comme si vous y étiez. Plutôt que d’assister à une conférence virtuelle située à l’autre bout du monde de façon passive, vous pourriez ensuite aller à la rencontre des autres participants et échanger avec eux sur les sujets qui vous passionnent.

Aujourd’hui la réalité augmentée reste un marché de niche en termes d’usage. La blockchain a permis de lancer depuis quelques années des crypto-monnaies telles que le bitcoin. Elle permettrait d’acheter des biens virtuels et des identités et de les transférer de manière transparente entre diverses plateformes constituant le Metaverse. De nouvelles applications blockchain, telles que la fièvre des NFT, augmentent l’adoption de la technologie et pourraient indiquer l’émergence d’une nouvelle économie des créateurs.

deep tech innovation Metaverse metaconomie — Image par Nurudeen Alidu de Pixabay

Alors que certaines marques se précipitent déjà pour s’emparer du gâteau, l’adoption généralisée ne se fera pas avant plusieurs années. En effet, les technologies nécessaires ont encore du chemin à parcourir pour optimiser leur fonctionnalité, leur facilité d’utilisation et leur coût. Une société de semi-conducteurs a déclaré qu’un Metaverse réellement immersif nécessiterait une efficacité de calcul 1 000 fois supérieure à celle des processeurs de pointe actuels…

“Quand un arbre tombe, on l’entend ; quand la forêt pousse, pas un bruit.”

Et si le Metaverse n’était que l’arbre quand le web3 pousse sans un bruit.

*** SOURCES ***